mercredi 4 février 2015

L'ironie de la chose...

Tout d'abord on passe une super soirée. Une soirée avec des amis que l'on n'a pas vue depuis une éternité. On se prend un vrai bol d'amour parmi des gens que l'on aime et qui nous aime, à n'en pas douter, avec les vannes habituelles, les semblants de chamaillerie et l'inévitable blind test de minuit

Et, parce qu'on ne supporte pas de dormir ailleurs que chez soi, on se décide à quitter cette superbe soirée et ses amis.

Parce qu'on est un peu moins vigilante ; parce qu'on a peu bu pour fêter quelque bonne nouvelle ; parce que c'était sans doute ce soir là et pas un autre, ce qu'on appelle un concours de circonstance, on ne se rend pas vraiment compte de ce qui se passe tandis que l'on écrit son SMS pour dire qu'on rentre bien, comme c'est ironique.

Les mains étrangères s'agrippent au portable. Sweat-shirt à capuche relevée pour ne pas qu'on voit le visage. On tente de retenir. On se débat car on n'est pas du genre à se laisser faire. Mais rien n'y fait : sweat-shirt à capuche est plus fort en nous poussant sur le trottoir. Ça va trop vite. C'est trop violent. Sweat-shirt à capuche est déjà au loin ; il a détalé comme un lapin.

Les passants s'empressent autour de vous en vous tendant un mouchoir en papier parce que vous saignez du nez ; ce que vous ne remarquez qu'à rebours. Votre main gauche en a pris un coup et vous avez du mal a plier les doigts.

Après...

Après s'ensuit la liste des choses à faire : suspendre sa ligne ; appeler les amis chez qui vous avez passé la soirée ; attendre qu'on vienne à vous et qu'on vous emmène au commissariat, désert car il est une heure du matin. Il est une heure ; on est crevée ; la nuit n'est pas encore finie.

Ces petits détails qui sautent aux yeux : le sang qu'on n'a pas bien nettoyé sur la main, et qui sèche, lentement mais surement - celle-là même qui fait un mal de chien ; ces deux petites gouttelettes qui se sont écrasées sur le pantalon gris clair – va t-on les rattraper ? - c'est fou ce genre de remarque qui nous vient à l'esprit ; les phrases que le policier nous dit pour nous remonter ; et d'ailleurs, après coup, cette réflexion ultérieure que cela aurait pu être pire, qu'il aurait pu se retourner pour nous balancer un coup de poing dans la figure et qu'après tout, ce n'était qu'un téléphone.

Mais on ne pleure toujours pas.

Les pleurs arriveront le lendemain, tandis que, pour s'occuper l'esprit, on balaie sans relâche ; tandis qu'on attend son tour chez SOS médecin, dans la salle d'attente et que les regards se détournent de vous, gênés.

Et l'on devient une statistique parmi les autres, sur un chemin que l'on a parcouru des centaines de fois.

L'ironie de la chose.

Et puis l'on écrit. On écrit parce que c'est la seule chose qui nous pousse à se dépasser ; dépasser nos craintes et nos peurs ;  calmer cette colère qui ne nous quitte pas. Mettre les mots sur les maux, comme on le fait depuis si longtemps ;  depuis qu'on sait tenir un stylo  entre ses mains.

La beauté de la chose.


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