samedi 13 novembre 2021

Novembre

Il y a un terme en psychiatrie qu'on appelle sidération. Et je  pense sincèrement que c'est ce sentiment que nous avons tous vécu cette nuit là, il y a six ans ;  dans cet étrange fragment de temps, nous nous sommes tous sentis Parisiens. 

De tous les attentats que le monde a  vécu, et aura encore à subir, hélas, ce qui s'est passé au Bataclan est pour moi celui qui me traumatise le plus. Et pourtant, en cette triste début d'année 2015, on avait déjà vécu l'horreur, l'indicible - je suis Charlie. Le mot est fort sans doute, traumatisme, mais je ne vois pas quel autre terme utiliser. Je ressens ce qui s'est passé comme un évènement qui me hante encore maintenant, et pourtant je n'y étais pas. Mais c'était à une heure de train de là où j'habite. C'était loin et si proche à la fois. J'étais juste la spectatrice impuissante, zappant frénétiquement entre toutes les chaînes, tentant de comprendre ce qu'on nous montrait sur l'écran ; presque minute par minute.

Il est inconcevable qu'on puisse faire un carnage parmi des terrasses, tandis que les gens sont ensemble afin de boire un verre ; ou encore qu'on massacre, délibérément, impunément,   une foule venue là pour s'amuser et écouter son groupe favori. Moi qui aime tant la musique, et le rock.

C'était un vendredi soir. Je m'en souviendrais à jamais. Je travaillais encore à l'époque à Saint Amand. Vélo train, train vélo, et il me semblait tout naturel de souffler ce vendredi là, allongée sur mon vieux canapé, dans ma position préférée. Je crois même avoir reçu un SMS me demandant si j'avais vu ce qui se passait à l'instant.

C'est à ce moment là que j'ai pris ma télécommande et que je suis passée d'une chaîne à l'autre, ayant du mal à croire que l'incroyable se produisait sous mes yeux, impuissante. Voilà, c'est le maître mot de cette funeste soirée : l'impuissance.

Et la sidération.

Fluctuat nec mergitur (Il est battu par les flots mais ne sombre pas), telle est la devise de Paris. Tel est également le nom du documentaire en trois parties que vient d'être diffusé sur la TNT et qui m'a insufflée ce besoin viscéral de parler du 13 novembre 2015.

Malgré moi, encore aujourd'hui, en regardant les témoignages, je n'ai pas pu empêcher les larmes de couler à flots comme cette nuit-là où, lui aussi sidéré sans doute, mon ancien voisin et ami, est venu toquer à ma porte pour savoir comment j'allais. Parce que lui aussi n'allait pas mieux que moi. Et que nous pleurions tous les deux dans les bras dans de l'autre. 

Cette image reste gravée. Deux êtres qui se consolent comme ils peuvent de la douleur du monde ; de la cruauté des êtres qui peuplent cette planète.

Et de l'incompréhension.

J'y pense encore.  J'y pense tellement que j'en écris une histoire. Je ne sais pas si je la terminerais. En tout cas, et comme à chaque fois que ma plume se fait impérieuse, cela me sert de catharsis.

Novembre est un mois où la tristesse se mêle à la mélancolie, pour bien des raisons. L'une en tout cas est cette perte de foi en l'humanité toute entière.

A la fin du visionnage de ce documentaire, pourtant, je ne retiendrais qu'une chose de l'une de ces survivantes : l'amour triomphe toujours à la fin. 

Et parce que j'écoute cette chanson en boucle ; que les paroles me parlent et me ramènent à cette soirée - chacun l'interprète comme il le veut bien sûr mais pour moi c'est ce qui s'est passé ce soir-là, et les jours d'après quand les gens viennent se recueillir sur le béton froid ensanglanté. Cette soirée qui fait si mal à notre propre humanité.





Hier, j'ai déposé des fleurs
Des roses blanches sur le béton
Ou le silence sur le désert
Où nos cœurs pleurent à l'unisson

Hier, j'ai déposé des fleurs
C'est la paix que j'venais courtiser
Des fleurs de toutes les couleurs
Des bleues, des blanches, des rouges séchées

Novembre à froid, c'est le brouillard sur la ville lumière
Nos cœurs dans l'coma, se remettent d'hier

Hier, j'ai déposé des fleurs
Chez la vieille dame sous ses grands airs 
Elle est courbée mais n'a pas peur
Qu'est-ce qu'elle est belle, la dame de fer

Hier, j'ai déposé des fleurs
Désarmés, la peur et ses guerriers
L'amour comme seul anti-douleur
Mon bouquet d'fleurs comme bouclier

Novembre à froid, c'est le brouillard sur la ville lumière
Nos cœurs dans l'coma, se remettent d'hier

Hier, j'ai déposé des fleurs
J'ai aussi fait crier la musique
Ses plus beaux airs, les grands classiques
Pour que se taise la terreur

jeudi 4 novembre 2021

Vie de merde.com (le retour)...

 ... ou comment j'ai fait mon coming out par inadvertance, ou plutôt par maladresse.

Je sais. Le titre est long et à vrai dire, il n'y a pas de quoi en faire un drame. Mais plutôt sourire, voire rire à mes dépends à cause de ma maladresse légendaire. On appelle ça communément un acte manqué, ce désir inconscient que j'avais de faire un joli coming out à la seule personne de mon équipe qui n'était pas au courant de ma situation sentimentale, désertique pour le moment malgré mes velléités de me vendre sur un site.

Commençons par le commencement.

Il y a peu, je me suis inscrite sur un célèbre site qui commence par Mee et qui finit par tic. Enfin non, j'ai plutôt réactivé mon profil délaissé depuis quelques temps comme un champs en jachère et j'ai fait un uptdate pour me vendre au mieux et attirer le chaland. D'ailleurs il faudrait que je songe à indiquer que j'ai une réelle passion pour la cuisine et nourrir les gens. Il parait que l'appel du ventre, ça marche plutôt bien. 

Depuis que Gayvox a fermé ses portes, toutes les lesbiennes de France, de Navarre et d'ailleurs ont migré sur cette plateforme. 

Après quelques conversations avec une certaine M., comment dire, cela s'est fini en eau de boudin. Bref, je me suis pris un râteau. 

Du coup, j'en parlais sur WhatsApp avec une de mes collègues qui est parfaitement au courant de mes inclinaisons. 

Petite aparté, je ne cache pas vraiment qui je suis mais je n'ai pas envie non plus de crier sur tous les toits au boulot, qui est quand même un milieu particulier même si, là où je travaille, la société à une position plutôt gay friendly. Garde toi de mes ennemis, mes amis je m'en charge. 

Ma collègue donc, me demande ce que M. m'a répondu. Je lui envoie donc une copie d'écran de notre bref échange avec ladite M. Sauf que...

Sauf que je n'avais pas fait attention et que j'ai envoyé ce printscreen à la mauvaise destinataire, en l'occurrence la seule personne à qui je n'avais pas fait mon coming out et qui n'a sans doute rien compris de ce que je lui baragouinais avant de supprimer les messages et d'en envoyer un tout dernier,  lui souhaitant de bonnes vacances et qu'elle ne devait sans doute rien comprendre à ce que je lui avait dit quelques minutes auparavant. Tout cela, avec un gros smiley mort de rire.

Parce que, vous savez quoi ? J'étais vraiment morte de rire quand j'ai compris ma bévue.

La prochaine fois que nous nous reverrons, au retour de ses vacances donc, quand nous serons toutes les deux en présentiel l'une et l'autre, j'aurais sans doute un sourire et confirmerais ce dont elle se doute déjà.

Dans un grand sourire ou même un grand éclat de rire et sans gêne ou malaise.

Comme un acte manqué quoi...

 Ah qu'ils sont traîtres ces moyen de communication modernes ! ;)