lundi 13 septembre 2010

Rentrée des classes - Game Over


Durant 4 mois au minimum, une librairie ressemble à une ruche... enfin, surtout les rayons scolaires, livres de poche et papeterie. Nos amis les collègues DVD/musique regardent passer le TGV tandis qu'ils répondent mollement aux questions des rares clients en magasin. Il faut savoir qu'une rentrée se prépare dès début mai. Pour ma part, je commençais à recevoir les commandes un peu avant car il fallait livrer les écoles avant la fin de l'année scolaire. Tout un chacun doit donc s'organiser un maximum pour que la ruée se passe au mieux. Oui mais tout n'est toujours pas si simple au royaume de Libraire-Land. C'est sans compter les rouages dans la machine, l'huile qui est bonne à jeter, les couacs dignes d'une fanfare désynchronisée... et les nombreuses crises de nerf.
Commençons par les fameuses listes, celles que tout libraire digne de ce nom se doit d'obtenir afin de préparer les quantités qui vont s'empiler sur les tables. Ne croyez pas que la liste est synonyme de sésame : il faut en effet se renseigner sur le nombre de classes qui vont utiliser tel ou tel manuel, vérifier si le code barre est correct et, à ce jeu, on peut avoir des surprises désagréables, vérifier également si l'édition demandée est toujours disponible auprès du fournisseur. On a souvent le cas d'un livre épuisé : c'est alors la croix et la bannière pour prévenir le professeur qui parfois, il faut l'admettre, fait sa tête de mule, pire que moi. On a beau leur dire : "la nouvelle édition est parue, celle que vous demandez n'existe plus" : ils s'en foutent comme de l'an 40 , comme de la prise d'Alésia par Jules César devant un Vercingétorix furibond. J'exagère peut-être mais j'ai déjà vu le cas de certains qui restent campés dans leur position et veulent garder à tout prix leur manuels tout miteux,  en aucun pas par nostalgie. On se demande jusqu'au se niche la radinerie ? Je pourrais vous en citer des profs qui demandent un bon de livraison pour un livre à 2 euros ou mieux, une gomme à 30 centimes. Mais non, je ne vais pas faire ma mauvaise langue...

Et encore, ça c'est quand on les obtient ces fabuleuses listes. Imaginez les ruses de sioux qu'il faut avoir pour obtenir les personnes en question : il y a toujours un assistant de l'assistant de, la secrétaire qui n'est plus la même du jour au lendemain, un temps d'attente téléphonique indéfiniment long puis plouf, plus de communication car toutes les lignes sont occupées  : bref que du bonheur, de la joie et de la bonne humeur, comme dans "la petite maison dans la prairie".


Mais il est vrai que la plupart des lycées et collèges jouent le jeu. L'intérêt de coopérer est tout de même que tous les élèves aient leur matériels et leurs manuels le jour de la rentrée proprement dite. Quelques collectivités ont même l'obligeance d'envoyer les listes sans tarder et sans qu'on ait eu besoin de les demander. 

C'est un fait : le temps joue contre le libraire en cette période cruciale. 

Certains éditeurs obscurs, du genre installés à Trifouillis-les-Oies, ferment pour les congés d'été. Le but de l'opération est de lancer les commandes afin qu'elles soient traitées et livrées une semaine au moins avant le jour fatidique. Le leitmotiv est : de la place, il faut faire de la place. 
Et que dire des conditions de travail !
Imaginez un quai de déchargement vide la plupart du temps qui, d'un coup se trouve inondé de palettes complètes, à perte de lunettes vue de myope. Parce que c'est lourd des bouquins, mine de rien. Surtout quand il n'y a qu'un seul transpal et que les diables, ces chariots si pratiques sont, ou cassés – comme ces caddies de supermarchés qui virent toujours à gauche en bien pire, ou  alors ils sont déjà pris d'assaut.
En tant que responsable des collectivités, je passais le plus clair de mon temps sur ce fameux quai, si possible les portes coulissantes grandes ouvertes, en plein été, pour à la fois profiter du soleil (quand il y en avait) et éviter d'allumer la minuterie tous les quart d'heures. C'était quand même plus sympa : je ne bronzais pas, je profitais de la clarté et parfois on me regardait comme un singe derrière sa cage, en se demandant si oui on non on devait me lancer des cacahuètes. Je passais le plus clair de mon temps à contrôler les quantités et vérifier l'état de la commande. Parfois je repartais dans mon bureau prendre une aspirine avant d'engueuler copieusement houspiller tel ou tel fournisseur qui n'avait toujours pas honoré ma demande et le temps, ça va vite, ma bonne dame ! 

Après la rentrée, j'étais tout le temps écartelée  entre le quai où il fallait continuer à contrôler, et les appels des clients qui n'arrêtaient pas - début de l'hystérie donc. Un coup de cutter est si vite arrivé sur la couverture d'un ouvrage (se reporter ici). Le livreur se plante de jour, voire d'adresse, laisse des cartons sur son quai à lui : tous les combinaisons possibles et inimaginables.
Avant d'accepter ce poste, j'étais du genre fille assez frêle. En 6 ans, je n'a pas eu besoin de fréquenter les salles de sport : essayez de porter des cartons de livres de 25 kilos tous les jours à raison de x fois, et vous comprendrez ! Sans compter les kilomètres de courses à travers les couloirs : Dieu, que je regrette de ne jamais avoir pratiqué les rollers !
J'aurais encore des choses à dire sur l'hystérie collective d'une rentrée scolaire en librairie, mais j'espère qu'au moins vous aurez une certaine idée de ce que ça peut représenter.






3 Avis intrépides:

Plume a dit…

Sûr, vu comme çà çà ne fait pas envie !

Bon courage, çà va se calmer (mais après Noël hein qui arrive à grands pas c'est çà ??)

Pop's a dit…

C'est amusant .. Je n'ai finalement jamais imaginee la folie de la rentree sous cet axe la ... Ni le cote poids et alteres que cela est ... Cela le transpal ca me fait rever ... moi qui reve de conduire des choses "insolites" ...

ma vie intrepide a dit…

@ Plume : c'est terminé pour moi ces choses là vu que je ne travaille plus en librairie mais, effectivement, de mai à décembre, c'est le rush.

@ Pop's : d'où l'intérêt de faire partager un peu mon expérience. J'ai piloté le transpal à de nombreuses occasions : il y a un sens pour que ça aille bien.