On revient toujours sur les lieux de ses premiers crimes, au tout au moins les endroits si familiers où on a vécu toute son enfance, et puis son adolescence. Le temps d'un week-end on remonte le temps, cette étrange machine à voyager dans les souvenirs lorsqu'on marche à nouveau dans les rues, ces mêmes rues que l'on a sillonné des millions de fois.
Le temps d'une respiration, face à la vie qui va trop vite ; le temps de se débarrasser de tous ces automatismes ; le temps de se délaver de toute cette fatigue accumulée – une femme rendue presque neuve au sortir du dimanche soir. Les gens ont si peu changé. Ils ont vieilli, bien entendu mais dans le fond, ils restent les mêmes, tels que vous les avez laissé il y a 12 ans.
Le revoilà le square du haut duquel nous sautions – cap ou pas cap ? Le pharmacien, égal à lui même derrière son comptoir. Seule la barbe a été rasée et les murs rafraîchis d'un coup de peinture. La fleuriste n'a pas changé sa devanture, même si pour l'heur le magasin semble fermé. Le collège est toujours là, un peu moins splendide, un peu plus terne. Avec un peu d'imagination, on pourrait presque entendre les rires et les cris des gamins que nous étions lorsque la sonnerie nous délivrait enfin de notre journée. Le petit banc sur lequel je m'asseyais, face au cimetière allemand, et sur lequel d'ailleurs je continue de m'asseoir, entourée de technologies et ma clope au bec... mais non, pas cette fois car un inconnu nanti de son affreux cabot se repose à l'instant où je passe en vélo. Nos regards se croisent une microseconde avant que je ne poursuive ma route.
Bien sûr, il y a tout de même des choses qui ont changé : la façade rutilante du bistrot où j'osais à peine mettre les pieds. Le mur, bétonné, de la supérette pour ne plus avoir à subir les violences de jeunes désoeuvrés, là où se trouvait jadis la sortie. Et puis à côté, un distributeur de boissons, incongru. Carmélino n'existe plus non plus, depuis longtemps hélas. Pour à peine 10 francs, nous sortions de l'épicerie avec un sac bourré de bonbons. Mais qu'est-ce qu'1 euro 50 maintenant ? Rien du tout. Et mon vieil amour, que je croise de temps en temps sur la toile... des photos où les cheveux se clairsèment, le long des golfes clairs ; le fossé continue de se creuser entre lui et moi, inéluctablement.
Et finalement, le temps d'un week-end, on se rend compte que rien ne reste finalement immuable, à part peut-être dans les yeux de l'enfant que l'on a été autrefois.
C'est ça aussi, revenir chez soi.
3 Avis intrépides:
La seule chose qui ne change jamais, qui reste immuable, ce sont les cimetières militaires, ça peut paraître incongru, dérangeant ou je ne sais pas...mais ces lieux restent pareils, je ne sais pas jusqu'à quand...
Voilà c'était mon avis intrépide !
Tu viens de m'offrir un bon moment de nostalgie :) Merci !
@ Asl : figure toi que j'allais souvent traîner dans les cimetières à la recherche d'inspiration et d'un peut de tranquillité (pour ça, pas de problème). J'aime ce côté immuable du cimetière justement.
@ Plume : y a pas de quoi !
Enregistrer un commentaire