Je me souviens précisément du moment où j'ai vraiment commencé à aimer la musique pour ce qu'elle était : un moyen de transport immédiat où allégresse peut côtoyer tristesse et mélancolie. Je ne pourrais bien évidemment pas vous indiquer la date et l'heure exacte mais, ce dont je suis sûre, c'est que ça s'est passé un après midi. Cet air-là, je pourrais encore le fredonner. Rien de transcendant pourtant. Pour certains ce sera un morceau jazz ou encore un morceau classique – un grand air d'opéra, une aria ; pour moi ce fut une chanson pop de 3 minutes et des poussières de secondes. Un air entraînant, un passage à l'harmonica – enfin je crois, et ce fut tout.
J'avais 13 ans et la radio rythmait les mercredi où je n'étais pas en cours. A côté de cela, la télévision ne faisait pas encore grise mine d'être délaissée de manière déloyale. Le temps télé nous était parcimonieusement compté et mes goûts se dessinaient, déjà, pour la science fiction avec les émissions des frères Bogdanoff, Temps X. A l'époque aussi, le carré blanc nous attiraient singulièrement, comme toute chose qui est interdite. Tiens, un de ces jours il faudrait que je vous parle de ce carré blanc qui, à la réflexion, n'avait de carré que le nom car il était de forme rectangulaire.
Grâce à la radio, je découvrais un autre univers où une voix rauque m'interpellait en répondant aux appels angoissés des auditeurs, curieux, ou encore taquins. Depuis, de semblables émissions ont éclos mais n'est pas Macha qui veut.
J'écoutais deux/trois stations, toujours les mêmes ; j'étais fidèle. L'animateur était maître de mes oreilles en programmant les chansons selon son bon plaisir, ou mon déplaisir lorsque la chanson n'était pas à mon goût. Il était si facile de tourner le bouton à la recherche de quelque chose sur lequel s'arrêter – une zappette radiophonique en quelque sorte. Désormais, je suis seule maître à bord via mon lecteur MP3 et parfois, oui quelques fois, il m'arrive de regretter le temps où une mélodie venait me cueillir la première fois que je l'entendais. Et puis, c'était sans compter les pubs, les plus souvent idiotes, voire agaçantes qui, par quel miracle, entraient dans votre tête une fois diffusée « ah, c'qu'on est bien dans son bain : on fait des grosses bulles, on joue au sous-marin » : vous voyez le genre !
Le déclic se produisit donc vers mes 13 ans boutonneux, prémisses d'un acné virulent pré-pubère. J'écoutais distraitement la radio lorsque l'homme à la voix d'or s'élança sur les ondes. En l'occurrence le tout premier titre du groupe « I'm specialized in you » dont je possède encore le vinyle 45 tours. Ce fut également le premier groupe dont je fus fan. Qui se souvient encore de « Time Bandits » et de son chanteur Alides Hiddings, « the man with the golden voice », au béret vissé sur la tête ? Si vous connaissez les Bandits du Temps, allez-y, épatez-moi. J'appris plus tard que le nom du groupe était tiré d'un film des Monty Python. Si ce n'est pas un signe, ça ?
Un peu plus tard, je croisais la route musicale d'Alphaville, au nom très Godardien et terriblement cold wave par son univers musical. C'est d'ailleurs à ce moment que l'étude de l'anglais prit une toute autre ampleur car je désirais connaître la signification de ces chansons pop. Je suis toujours fan d'Alphaville - j'ai tous leurs albums, mais Marian Gold s'est quelque peu laissé aller, même si la voix est toujours là.
Plus tard encore, je devins résolument New Wave – The Cure, Joy Division, New Order, les Siouxies. Vêtements noirs, croix en pseudo argent, cheveux en bataille : j'avais toute la panoplie ou presque. Et un peu punk aussi dans ma manière de penser. Vive les Béru, Ludwig von 88 et Gogol 1er. Punk un jour....
Mes années 80 ont été fastueuses. J'ai découvert énormément de choses grâce à ces radios qu'on disaient libres après avoir été longtemps pirates – à l'abordage, moussaillons, allons dégourdir les oreilles de ces blancs becs.
Peut-être qu'un jour, enfin, je vous les raconterais, mes années 80, lorsque nous partions à trois kilomètre de la maison, à pieds, joyeusement, pour nous rendre en boum ; où encore quand nous allions en boîte, la bande de quinzaine de jeunes gens désinvoltes, à l'assaut des pistes de danse, attirés par l'émergence de ce nouveau son, la house, l'acid et la new beat ; fascinés également par le meilleur danseur aka « le révolutionnaire » - tel était son surnom.
Peut être qu'un jour....
Mais une chose est sûre : je me souviens parfaitement de cet après midi où je sentis de manière inéluctable que l'une de mes plus belles histoires d'amour serait la musique, même si à mon grand regret, je peine à plaquer quelques accords sur une guitare.
2 Avis intrépides:
Même histoire d'amour, même incapacité à dompter la guitare...
Je ne désespère pas de m'y mettre sérieusement, à la guitare. D'ailleurs parfois je m'arrête devant les vitrines.
Enregistrer un commentaire