Aux
yeux de beaucoup, je passe pour une parfaite excentrique.
Enfin parfaite, je n’en suis pas sûre mais excentrique sans aucun
doute. Quoi que, à bien y réfléchir, il y a sans doute plus
atteint(e) que moi.
Je
ne sais pas s’il existe des origines ou des événements
précurseurs, mais aux yeux de mon entourage, il n’est pas rare que
se dessine un étonnement, ou encore un léger sentiment de moquerie
dans les yeux lorsqu’on me croise, ou recroise encore.
Tout
d’abord, puisqu’il faut bien commencer, il se trouve que mes
compagnons à quatre pattes vivent dans une parfaite liberté dans
les quelques 60 mètres carrés que je loue. Quand on me demande
pourquoi pas en cage ? c’est moi qui prend cet air
d’étonnement, qu’on soit étonné(e) justement qu’ils ne soient
pas en cages. Je leur pose alors cette fameuse question : « ça
ne vous viendrait pas à l’esprit de mettre un chat ou un chien en
cage ? Et bien moi, c’est pareil ». La plupart du temps
je répond sur un ton badin. Après tout, c’est à moi de faire en
sorte que tout soit bien sécurisé – un rongeur reste un rongeur,
même si techniquement il s’agit de lagomorphes. Et tant pis pour
ma pomme si un câble de téléphone est mystérieusement, et
sournoisement, coupé net. Comme dit le proverbe : « pour
vivre heureux, vivons… en liberté ». Pour clore ce sujet, si vous tendez l'oreille à ma porte, il m'arrive de leur parler en allemand.
A
cela s’ajoute mon étrange passion pour les vampires. Non pas les
chauve souris, bien que je ne les trouve pas hideuses, mais ces
étranges créatures vivant dans la pénombre de ta chambre,
attendant que tu t’endormes avant de te croquer joliment le cou
avec leurs longues quenottes. Ces étranges créatures issues des
cultures européennes, africaines et en vérité, inhérentes à
toutes les cultures de la planète. Immortalisées par la
littérature et le cinéma ou encore les séries. Que voulez-vous si
moi aussi je subis l’étrange fascination de ces morts-vivants ?
Ou plutôt vivants après morts puisque les morts vivants sont
essentiellement des zombies de tous poils. Ma collection s’est
étoffée avec le temps. Je n’en parle pas longuement. J’effleure
le sujet, sauf si la personne en face de moi a l’air aussi timbrée
que moi dans cette étrange collection. Et alors là, je peux vous
faire un exposé en trois parties avec introduction et conclusion.
Que dire également de ma
passion, que dis-je de mon addiction implacable et grandissante, si
c'est possible, voire dévorante, à ce pour le moins loufoque Docteur qui
n'a pas de nom. Je parle bien entendu de Doctor Who. Mon
regard s'allume. Ma langue se délie. Et je pars dans des wibbly
wobbly timey wimey cher à Ten. J'ajuste mes lunettes,
arbore un grand sourire et part dans des délires que seuls les
aficionados comme que moi peuvent comprendre. Il suffit que je
rencontre un mordu pour que la discussion s'enflamme, à
décortiquer chaque épisode et replacer les meilleures répliques
dans la langue de Shakespeare. Il m'arrive aussi de lancer un
« Geronimo », « Allons y Alonso »
lorsque je dévale les rues du centre ville sur mon deux roues. Et
parfois, je ponctue mes phrases par un « What? »
insistant et agaçant. Comprend qui sait. Il faudra vraiment un jour
que je vous parle de ma série préférée de tous les temps.
Dernière
excentricité en date. Si tant est que changer de vie est
excentrique. Mon mode alimentaire. Non seulement je persiste et je
signe, mais je continue dans ma lancée. C'est un mode de vie comme
un autre, certes, et je fais partie des quelques 5% en France. Et sur
ce coup là, je ne me sens pas plus excentrique que ça à vrai dire.
Mais dans le regard de certain(e)s, je passe peut-être pour un
illuminée, ou quelqu'un qui a d'étranges manies quand elle demande "quelle type d'huile pour les frites?" ou bien quand je consulte longuement les étiquettes quand je fais mes courses. Je ne m'étendrais
pas davantage là-dessus.
Enfin, je vous passe volontiers mes excentricités vestimentaires. Sur ce coup là, je me suis calmée avec le temps et les rondeurs fatidiques de la quarantaine. Mon look de titi parisien, mes croix et mes bretelles : je les ai laissé au vestiaire. Quoi que, à bien y réfléchir, j'ai gardé ma gouaille légendaire de ces années fastueuses de ma jeunesse.
Alors,
finalement excentrique ou... ?
Ou bien simplement passionnée ?
Ou bien simplement passionnée ?
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