Il
y a peu, je me suis enfin décidée à changer de binocles. Depuis
l’âge révolu de 11 ans je fais partie en effet de la catégorie
« des
myopes ascendant taupe »,
doublé par ailleurs de deux yeux astigmates. Et ce n’est pas avec
mon âge déclinant que les choses s’arrangent…
Il
y a 30 ans donc, aller chercher ses lunettes chez l’opticien avait
tout du cauchemar. Bizarrement, obtenir un rendez-vous chez
l’ophtalmo était plus rapide, pas comme aujourd'hui donc. Porter des lunettes à cette époque
vous faisait invariablement passer dans la case
« adolescente
boutonneuse
à jean de velours pattes d’éph' ».
Si je force le trait, c’est que je me souviens très bien d’un
vieux jean velours côtelés gris bleuâtre largement évasé sur le
bas – tout ce qu’il y a de plus glamour ! La mode a bien
changé, et moi aussi, Dieu merci.
Appartenir
à la catégorie tristement connue des binoclards n’a jamais été
une sinécure. Cela s’apparentait plus à une
longue torture morale : non seulement celle d’avoir
constamment des loupes sur le bout du nez, mais aussi d'être
ce(lui)lle montré(e) du doigt à la récré car toujours fourré(e)
dans un coin en compagnie de ses maudits bouquins ; ce(ui)lle
aussi d’être naturellement désigné(e) pour porter le titre peu
glorieux et non moins lourd de « premier(e)
de la classe » -
donc le chouchou du prof ; donc la fille/garçon à abattre.
Il
y a 30 ans porter des lunettes creusait le fossé entre le reste du
troupeau et le mouton noir, moi donc, que j’étais déjà à mon
corps défendant.
Si
je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas
connaître, c’est que les lunettes étaient loin, à l’époque,
d’être des accessoires de mode tels que Smartphone et autres
I-pad. Je l’ai toujours nommé « mes
lunettes de sécurité
sociale ».
Et, de fait, elles le sont véritablement restées – quand on
regarde le forfait octroyé par ce sympathique organisme. Rien n’a
vraiment changé de ce côté : avoir de mauvais yeux reste un
luxe, un privilège que seule une bonne mutuelle permet d’acquérir.
Mais
passons.
Mes
premiers binocles étaient une véritable catastrophe en matière
d’image. Un plastique blanc 1er
prix avec quelques effets rosâtres, vaguement rectangulaires si je
m’en souviens bien et, déjà, des verres épais comme des culs de
bouteilles tant ma myopie était importante. Tout pour plaire donc !
Les
suivantes furent moins affreuses, enfin pour l’époque : de
l’écaille marron. Mais, les opticiens n’ayant alors aucune
notion de la morphologie, elles me mangeaient une bonne partie des
joues.
Je
restais toutefois dans le marronnasse sérieux qui sied à une
première de la classe, tout en réduisant quelque peu la taille et
l’épaisseur de mes verres - la technique s’améliorant avec le
temps, pas comme ma myopie qui s’aggravait, elle.
En
vacances au Portugal, je changeais de couleur tout en restant dans
l’écaille. Mon parrain possédait en effet deux magasins d’optique
et eut la bonne ( ?) idée de m’offrir une nouvelle paire de
lunettes, jugeant celles que je portais tout simplement moches de
chez moches. Cependant, malgré ces efforts louables, ce n'était pas
encore ça.
Avec
les progrès en matière de lunetterie, les binocles sont devenus
hype,
même hipster,
qui l’eût cru ? Pas moi en tous cas. Marques tendances –
voire de grand couturier ; matériaux plus légers ; verres dix fois plus fins : le bonheur. Je pouvais enfin passer dans la case
fashion victim
ou presque, parce que moi, je suis quand même obligée de les porter
si je veux voir quelque chose au travers de ce brouillard quotidien.
Ce
fameux samedi, comme un gosse à l’approche de Noël, j’avais
grand hâte de me rendre au rendez-vous que m’avais fixé mon ami
Alain, celui qui aime offrir une 2ème
paire pour 1 euro.
Mais
pourquoi ne porte t-elle pas des lentilles, me diriez-vous ?
La
force de l’habitude sans doute n’y est pas étrangère. Quand je
retire mes lunettes, j’ai tout l’air d’une vieille chouette qui
a fait trop la bringue la nuit dernière et les nuits d’avant.
Et
puis, c’est quand même devenu un accessoire comme un autre qui peut vous habiller joliment le regard...
2 Avis intrépides:
:)Je suis pour les lunettes aussi! Je ne pourrais jamais porter des lentilles... ça me fait trop flipper. Par contre, moi j'ai commencé à en porter à l'âge de 18 ans... je ne te dis pas l'enfer. Et puis à chaque fois que tu portes pour la première fois de nouvelles lunettes, t'as l'impression de marcher dans l'espace... la dernière fois (soit il y a 2 ans), j'ai failli me casser la tronche à cause de ça.
C'est clair que justement on voit un peu trop clair en sortant avec ses nouvelles lunettes. Comme si tout était trop brillant, presque en relief. Heureusement qu'au bout d'un bon quart d'heure, l'oeil s'adapte à la nouvelle vision ;)
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